Nouvelle – Délivrance ?
L’accouchement
L’espace dont je dispose est réduit et sombre, mais douillet et me va d’ailleurs comme un gant : je m’y sens parfaitement bien, malgré le manque de place et l’obscurité dans laquelle je suis constamment plongée.
Des Bruits…
Des bruits me parviennent, étouffés, comme érodés et arrondis par l’espace moelleux qui m’en sépare.
Ils me tiennent compagnie : l’un d’eux, en particulier, domine, non pas qu’il soit plus intense, mais parce qu’il est constant, omniprésent : une série de battements sourds et réguliers qui, à l’infini, rythment le temps qui passe. Je les perçois tout autour de moi, sans interruption : Je suis en quelque sorte, plongée dans un sempiternel bruit de tam-tam assourdi qui me caresse délicatement, atténué, réconfortant comme une présence amie.
Prise de conscience…
Et c’est nourrie de cette présence que je deviens moi et que, petit à petit, je prends conscience de mon être qui se fait et qui se forme.
Ainsi, je sais que j’ai quatre membres, terminé chacun par cinq petits doigts très mobiles. Je peux si je le veux, saisir l’un de ces quatre membres avec n’importe lequel des trois autres. Je sais qu’ils sont à moi et qu’ils m’obéissent.
Force…
Je découvre ma force, je bouge mes membres comme il me plaît et lorsque je trouve le temps un peu long, je suce mon pouce et je m’endors.Je peux si je le veux, saisir l’un de ces quatre membres avec n’importe lequel des trois autres.
Je sais qu’ils sont à moi et qu’ils m’obéissent. Je découvre ma force, je bouge mes membres comme il me plaît et lorsque je trouve le temps un peu long, je suce mon pouce et je m’endors.
Je grandis…
Au fil des mois je me sens grandir et me transformer. Je suis loin du temps où je n’étais encore qu’une sorte de petite boule, ou plutôt un petit oeuf replié sur lui-même et sur sa propre rotondité.A présent je ne me reconnais plus : je m’épanouis et je m’étale dans un cocon souple, tiède et confortable où je peux bouger, me retourner, la tête en bas, et surtout, où je me sens devenir moi, tout à fait moi.
Là, hormis les battements du coeur de ma mère et quelques échos ouatés de voix que je reconnais comme étant celles de mes parents, je savoure en toute quiétude, mon apesanteur et j’en profite pour m’essayer à virevolter de-ci de-là au bout de mon cordon ombilical comme un cosmonaute dans sa navette.